mardi 21 juillet 2015

Brèves de paradis n°1 - Les moments de grâces qui sont, quand même, vachement chouettes

L’avantage de travailler dans un cabaret, c’est que pendant les moments de blanc, il y a le spectacle à regarder. Et autant vous dire que vu le peu de clients qu’il y avait au cabaret cette semaine, j’ai eu du temps pour admirer la dextérité des danseuses de cancan et pour observer le final qui, à force d’être répété depuis 7ans, est aussi rafraîchissant et motivé qu’une casserole de lait qui déborde. 


                                                                     Les danseurs dans l'attente de leur libération

Mais ce n’est pas parce que le client est aussi rare qu’un poil sur un cailloux qu’il n’y a pas des soirées bien pourries et bien décevantes. Voyez vous, l’été, les touristes les plus coopératifs font des picnics au Luxembourg ou vont prendre des selfies devant la Tour Eiffel : Ils ne viennent pas s’enfermer dans un cabaret dans lequel la climatisation est aussi efficace qu’un verre d’eau à température ambiante ( je suis pleine d’images cette après-midi, dites moi. ). 

Cela ne nous laisse plus qu’UNE SEULE clientèle : De juillet à septembre s’étend la douloureuse période des groupes organisés, et il y en a deux sortes.

                                    Celle des Indiens et celle des Brésiliens. 




Les Brésiliens sont sympathiques, souriants, parlent fort et aiment poser. Ils achètent des photos, et en redemandent, bref, ils sont gentils, pas sexistes et coopératifs, et je les aime. 


                                                                           Moi quand j'ai des clients brésiliens 

Les Indiens, de l’autre côté, sont un peu plus complexes. La culture indienne reste encore très conservatrice, et entre ceux qui refusent d’être pris en photo par pudeur ( ce que je peux comprendre ) et ceux qui acceptent mais qui n’achètent pas, il y a des moments de solitudes intense. Et évidemment, les Indiens sont généralement placés de mon côté de la salle. Rarement, il y a des groupes sympathiques qui te redonnent foi en l’humanité, et souvent il y a des groupes qui décident que, comme tu leur apporte un service, ils peuvent jeter l’argent sur la table sans te regarder et te faire partir d’un geste bien sympathique de la main. ( Evidemment, ce n’est pas spécifique aux groupes d’indiens, les français aussi sont compliqués, mais comme les groupes d’indiens sont les plus présents au cabaret ces temps-ci, c’est d’eux que je parle. ).


MAIS NE VOUS INQUIETEZ POINT MES ENFANTS, parce que l’avantage de l’été c’est que certains artistes partent en vacances. Et que, dans ces moments là, il y a la Foulariste ( Néonéonéoooologiiisme ) qui vient les remplacer. la Foulariste fait un numéro de sangles aériennes. En gros, elle fait des acrobaties le long de deux rubans qu’elle enroule autour de ses bras et de ses jambes. Et quand vous passez une soirée nulle et que le numéro commence, ça vous remonte le moral. Le numéro de la Foulariste est beau. Il est poétique, il fait rêver. 
D’autant plus que la Foulariste, qui a travaillé pendant un temps au Cirque Bouglione, est la première femme a avoir excellé dans ce domaine de compétence. 
La Foulariste est belle, elle est humble, elle est talentueuse, elle est gracieuse, elle est délicate et pendant ses 6 minutes d’acrobaties aériennes, le temps s’arrête. C’est un moment de grâce, une intervention de pure beauté et de pure poésie. Le temps de ce numéro il n’y a plus qu’elle dans le monde : Vous vous en fichez d’avoir passé la soirée à angoisser parce que votre nombre de photos n’était pas assez bon, vous vous en fichez de la transpiration, des ampoules et de l’appareil photo trop lourd. Il n’y a plus qu’elle et vous vous en fichez du reste, le monde entier devient silencieux et n’a d’yeux que pour elle. Et vous allez même jusqu’à oublier qu’il y a d’autres gens avec vous dans la salle.

Ces petits moments de grâce que vous apercevez à la sauvette, ça sauve votre soirée. Quand je suis arrivée au cabaret, j’ai du suivre pendant quelques soirs une de mes collègues qui, dès mon premier jour, m’avait montré comment une soirée de travail peut mal tourner. Et ce soir là, ma collègue - mon amie - s’était adossée avec épuisement près de la scène pour écouter notre chanteuse chanter Edith Piaf. Elle, qui avait passé une bonne partie de la soirée dans la panique, s’est calmée et m’a dit doucement «  Tu vois, parfois tu passes des soirées de merde. Moi dans ces cas là je m’arrête pour écouter Olivia et ça va mieux après ». 
Et c’est peut être bateau, mais cette simple phrase constitue mon premier souvenir en tant que photographe au cabaret, et il prend tout son sens dès que la Foulariste quitte le sol.

La Foulariste s’appelle Natalia, et elle a sauvé bon nombre de mes soirées, et elle ne le sait pas. Elle ne me connaît pas, mais moi je ne l’oublierais jamais !



                                                                       


P.S. J’adresse mes remerciements chaleureux au client qui a décidé que c’était fun de prendre des photos avec moi dans lesquelles il me tirait les joues, mes les embrassait avec bave et joie, ou dans lesquelles il me montrait du doigt style «  Regarde, une parisienne ! » . Merci monsieur, vous m’avez fait vomir dans ma bouche.


Bisous mes enfants 

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